Ecrivain.
Charles Géniaux connut une certaine notoriété dans le monde des lettres au début XXème. Auteur entre 1893 et 1931 d’une quarantaine de romans et de récits ainsi que de très nombreux articles, il fut lauréat du Prix de l’Académie française. Il laissa une « oeuvre touffue, dense, parfois baroque et excessive, parfois surranée et désuète… » (1). Il écrivit plusieurs romans orientalistes qui lui valurent l’hostilité des colons et l’amitié des nationalistes d’Afrique du Nord. Féministe, pacifiste, Géniaux avait une personnalité très contrastée :
« Charles est immense et maigre avec un physique à la Don Quichotte. Cheveux en bataille, il gesticule, vocifère contre l’esprit « bôrgeois » et pour un gauchisme romantique. Contestataire et conservateur, il veut tout et le contraire de tout. Il se dit anarchiste traditionaliste. « (2)
Attaché à défendre et promouvoir la Bretagne, il fut impressionné par ses marins sauveteurs, en particulier par Louis Auffret de Saint-Guénolé : il lui consacra un chapitre de son livre « La Bretagne vivante » et s’inspira de ses exploits pour son roman « l’Océan ».
Ce roman entièrement situé à Penmarc’h, mérite d’être redécouvert. L’histoire, le style sont bien sur un peu dépassés, mais on y trouve des descriptions saisissantes ; c’est un précieux témoignage de la vie quotidienne à Saint-Guénolé, juste avant la Première guerre mondiale. Voici par exemple un paragraphe consacré à la récolte du goémon :
« Marins roux de Saint-Gwennolé, paysans pâles de Plomeur ou de Saint-Jean-Trolimon, mêlés, travaillaient à conquérir ces fourrages océaniques qu’ils faneraient ensuite comme les herbes des champs. Les hommes chargeaient des charrettes à ridelles attelées à de petits chevaux aux pelages touffus comme des tapis. Lorsque les fucus débordaient, les conducteurs comiquement vêtus de chemises flottantes par-dessus leurs pantalons retroussés, fouettaient leurs bidets, secouaient les rênes en cordes et hurlaient afin d’entraîner leur équipage à l’assaut de la dune. Après dix mètres l’animal épuisé s’arrêtait la tête entre les jambes, sur la pente croulante, et le charretier bondissait sur un rayon de l’avant afin d’empêcher la voiture de reculer. Lorsque le goëmonier manquait son saut sur la roue, le petit cheval était enlevé entre les brancards par sa sangle et battait l’air de ses pattes poilues ». (3)
Ce roman, un des meilleurs de l’auteur, a été écrit en 1910-1911 et publié en 1913.
(1) Frélaut, Bernard .- Un inventeur de la Bretagne : Charles Géniaux .- Mémoires de la société d´histoire et d´archéologie- n° LXXV – 1997 .- Pp 309-334 : ill.
(2) La Ferrière, Martine de .- Jordic, un artiste à l’île-aux-Moines avant 1914 .- Moëlan-sur-Mer : Blanc silex, 2003.
(3) Géniaux, Charles .- L’océan : roman .- Paris : E. Fasquelle, 1913 .- 314 p.