Ifern

Ifern = enfer

Parc et liors an ifern

« Parc an yfern » (1751, 4E 205 49) ; « Liors an ifern » (1833, 3P159 3, cadastre) ; « Parc an ifern » (1833, 3P159 3, cadastre) Toponymes de Kerouil

Ces deux parcelles mitoyennes sont situées au nord de la rue Lucien-Larnicol.

Autrefois l’enfer pour les Bretons était souvent associé au froid, à l’humidité : « an ifern yen ». Dans les monts d’Arrée par exemple, les marais du Yeun Elez étaient considérés comme l’entrée des enfers. Selon Bernard Tanguy, ifern peut aussi par métaphore être un hydronyme : il aurait donc ici le sens de lieu bas, voire de marécage. Ces parcelles sont proches du marais de Kerouil : si cette interprétation du mot ifern est la bonne, on peut imaginer que le marais s’étendait plus au nord au Moyen Age. Notons qu’une parcelle voisine de Liors an ifern et Parc an ifern se nomme Parc yen, « champ froid ».

Tal ifern

« Taliverneviene » (c1780, carte des Ingénieurs géographes) ; « Talivernevrase » (c1780, carte des Ingénieurs géographes) ; « Talifern » (1871, Thomassin in Pilote de la Manche…) ; « Tal-an-Ifern bras» (1881, 15U22 59? Partage des communaux de Kerouil) ; « la pointe du trou de l’enfer (Toulan ifern) par temps calme » (sd, carte postale Kervennic) ; « Toul an-Ifern » (sd, carte postale Lévy n°27) ; « Toul-en-Ifern » (sd, carte postale Neurdein n°55) ; « Toul en Ifern » (sd, carte postale Villard n°6607) ; « Toul-en-Ifern (Trou de l’Enfer) » (sd, carte postale Villard n°283) ; “ Rochers de l’Enfer” (sd, carte postale Neurdein n°65) ; « Rochers tal en ifern » (années 1920?, carte postale Tanniou) ; « Le trou de l’Enfer » (années 1920?, carte postale Tanniou) ; « Talifern » (1953, Auguste Dupouy in Souvenirs d’un pêcheur en eau salée) ; « Tal an Ifern » (1961, Alain Le Berre : Toponymie nautique…Dénomination locale) Toponyme de Kerouil

Le trou de l'enfer lors d'une tempête.
Les rochers du  trou de l’enfer lors d’une tempête.

Cet amas rocheux imposant  se dresse à la pointe de Saint-Guénolé. Ici encore nous avons affaire à un enfer froid ou à tout le moins humide !

Le Trou de l’Enfer est caractérisé par une grotte, habitée par une sorcière selon la légende (1). Une version de cette légende est racontée par Paul Féval fils dans son roman « Ton corps est à moi » :

« Là habitait jadis, raconte la légende, la fameuse sorcière Ar-mer-noz (La femme de la nuit), ancienne druidesse de l’île de Sein. Cette maléfique, impitoyable à tous, avait pourtant un culte, celui des jeunes vierges, elle exauçait presque tous leurs désirs. Sa puissance était considérable. Quant une vierge avait vu mourir une personne aimée, mère, père, frère, soeur ou fiancé, elle accourait aussitôt au Toul-an-Ifern, entrée de l’Enfer par laquelle devait passer toutes les âmes, et elle criait par trois fois : « Ar-mer-noz, Ar-mer-noz, Ar-mer-noz rends-moi celui (ou celle) que j’aimais! » L’écho répétait la phrase magique le long des couloirs, et la voix cassée de la sorcière s’élevait alors, dictant sa réponse. Quand la jeune vierge rentrait chez elle, elle y trouvait, vaquant à ses occupations, celui (ou celle) qui quelques heures auparavant était sans vie (2). »

Autrefois, on distinguait deux Tal ifern : viene pour vihan = petit et  vrase pour vras = grand. Tal ifern vras a depuis pris le nom de Roche du préfet ou Roche des victimes.  Tal a le sens de face à, près de et aussi de front, de pignon. On constate qu’au début du siècle les variantes du nom de ces roches étaient nombreuses, la mieux représentée étant Toul an Ifern = Trou de l’enfer. Les éditeurs de cartes postales ne se contentèrent pas de (re)nommer cet amas rocheux, ils jalonnèrent le parcours du promeneur d’un grand luxe de détails : « l’entrée du trou d’Enfer » (3), les « couloirs de l’Enfer (4) », « la cheminée de l’Enfer (5) » et même « Vue intérieure de l’Enfer de Saint-Guénolé Penmarc’h (6) » !

De nombreux drames se sont déroulés dans les parages de ces rochers, citons par exemple  la « Mouette » de Camaret qui y fit naufrage le 27 mai 1897, deux passagers espagnols moururent noyés (7).

Bazenn Talifern

« B(ass)e Youtalivern » (1904, plan des Roches de Penmarc’h du Service hydrographique de la Marine) ; « B. Talifern » (1953, Auguste Dupouy : Souvenirs …) ; « Bazenn Tal an Ifern » (1961, Alain Le Berre : Toponymie nautique…Dénomination locale) Toponyme nautique

Les roches de Bazenn Talifern au centre de la photo sont visibles lors des gros coefficients de marée.

Il s’agit de quatre têtes de roches voisines de Tal ifern ; elles sont visibles lors des grands coefficients de marée. Je n’ai pas d’explication convaincante pour Basse Youtalivern : est-ce un pluriel du mot basse agglutiné au terme suivant ? Faut-il y voir le mot yod = bouillie, prononcé youd à Saint-Guénolé ? A moins que ce youd soit l’équivalent du Youdig du Yeun Ellez dans les Monts d’Arrée, c’est-à-dire l’entrée du gouffre de l’enfer.

(1) Jégou, Lucien .- Penmarc’h…

(2) Féval, Paul .- Ton corps est à moi…

(3) Carte postale Nozais n°10, sd.

(4) Cartes postales Villard n°823 et n°825, sd.

(5) Carte postale Neurdein n°60, sd.

(6) Carte postale Combier, sd.

(7) Le Coz, François in Monfort, Rémy .- Penmarc’h…

Ce contenu a été publié dans Rochers, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , , , , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *