Ecrivain.
Professeur au lycée de Quimper de 1937 à 1939, Julien Gracq se rendait volontiers en Pays bigouden lorsqu’il disposait d’un peu de temps libre. Il découvrit probablement Saint-Guénolé lors d’une de ses petites excursions dominicales et y revint régulièrement par la suite. On trouve ça et là dans son oeuvre quelques traces de ces promenades, en particulier dans « Lettrines » et dans « Carnets du grand chemin » :
« Je n’ai jamais revu, depuis la guerre, monter au-dessus des grèves de mer de l’automne ce signal de solitude, qui était un adieu presque mystique à l’agitation et à la joie des vacances : les fumées des goémoniers du Finistère. On pratiquait alors, après les marées d’équinoxe, de longues tranchées dans le sable où on entassait le goémon d’épave sec, en prenant soin de ménager par-dessous une aération : après combustion, on recueillait les cendres riches en soude. J’observais ces travaux souvent près de Saint-Guénolé. L’industrie chimique moderne a dû depuis belle lurette liquider cet artisanat préhistorique, parti rejoindre les feux couverts des anciennes meules des charbonniers. Mais une part de la poésie de l’automne a déserté pour moi avec lui les plages d’octobre. C’était une fumée tremblée, qui montait d’abord presque transparente, comme la vibration de la chaleur sur l’asphalte des routes d’été, avant de se densifier faiblement en bouffées d’un blanc gris qui dérivait lentement dans le fil du vent au-dessus du sable. Il y avait là la paix presque souriante de l’été consumé et du rideau tombé et aussi la petite âme songeuse, menacée et pourtant opiniâtre, qui s’éveille dans tous les feux qui brûlent au bord de la mer. » (1)
(1) Gracq, Julien .- Carnets du grand chemin .- Paris : J. Corti, 1992.